Hier je rencontre Hervé. Hervé est un amateur de rock, aussi je lui pose la question « Alors, le dernier McCartney, tu l’as écouté ? » Il me répond : « Sur France Inter, un journaliste a déclaré que le dernier McCartney était sans intérêt ». « QUOI ??? » répliquai-je « Sans intérêt ??? » J’avais déjà en tête quelques pépites qui, selon moi, ne permettaient absolument pas de dédaigner l’opus 2007 du bassiste des Beatles. « Sabotage » voilà comment je traitai l’intervention du journaliste de France Inter, qui, d’une pichenette, évinçait l’œuvre du maître.
De toute façon, j’avais prévu de mettre en ligne le fruit de mes écoutes successives de Memory Almost Full mais, après ma rencontre avec Hervé, la chose était entendue, il fallait rétablir la vérité. Et qui mieux que moi est à même de le faire ? En toute modestie, pas grand monde, car votre serviteur, en matière de McCartney, sait être d’une impartialité à toute épreuve.
Ce que vous allez lire ci-dessous est certainement ce qui restera comme la plus objective des critiques de Memory Almost Full, le nouveau chef-d’oeuvre du plus grand compositeur de ce siècle. Rien que ça, je vous assure.
L’album démarre avec Dance Tonight avec son riff de mandoline. C’est sympa, entraînant, sans conséquence... une ouverture de disque comme McCartney les aime. Selon l’auteur, c’est le tout dernier titre composé et enregistré pour l’album. Le titre suivant Ever Present Past se veut léger, pop mais il m’évoque un peu trop les chansons des albums des années 80 comme « Pipes of Peace ». Pas ma période préférée. Bon c’est l’un des deux titres de l’album que je qualifierai d’assez moyen. Vient ensuite See Your Sunshine. Ouïe, les chœurs me font un peu peur... Mais cette basse... énorme qui surfe sur la mélodie. J’adore la seconde partie du titre à partir « She picks up daisies from a field... » très Wings. Mais, oui, je l’accorde les chœurs sont... comment dire... un peu pénible. Je suis à peu près certain que Nigel Godrich n’aurait pas laissé passer ça... Mais voici Only Mama Knows avec son intro classique qui laisse place à un bon rock dans la lignée de Juniors farm ou encore rock Show. Une parfaite réussite.
Il faut attendre la 4ème plage pour entendre la première ballade du disque, You Tell Me. McCartney, la voix haut perchée sur des accords de guitares nous sert une redoutable mélodie dont il a le secret. Le tout arrangé avec beaucoup de sobriété. Grandiose. Mr Bellamy ne m’enthousiaste pas plus que ça, même si le morceau est loin d’être mauvais. Mais là encore le producteur de « Chaos And Creation » aurait pu en faire quelque chose de beaucoup plus intéressant. Avec Gratitude ont revient sur du solide. Du McCartney à fleur de peau, avec une ligne de basse si caractéristique pour toute personne ayant entendu Abbey Road. Du grand art.
Nous attaquons maintenant un enchaînement de chansons, encore une technique qui rappelle la face B d’Abbey Road. Mais le premier titre Vintage Clothes évoque furieusement les Wings de Red Rose Speedway. Sans transition voilà le That Was Me, titre rock&roll qui lorgne plutôt du côté des années 50. Pas mal mais anecdotique. Mais voici, sans crier gare, My Feet In The Clouds. Puisque je suis dans les références, ici c’est clairement « Ram » auquel il faut se raccorder, le pont du milieu exceptée, un peu faible d’ailleurs. Mais voilà encore une mélodie inspirée.
J’adore House of Wax. Son attaque au piano, un arrangement digne du Pink Floyd. Le solo final est d’ailleurs digne des envolées de David Gilmour. Une réussite tant sur le plan de la composition que de l’arrangement.
Retour à la sobriété avec une chanson assez mélancolique car notre Paulo y évoque sa propre fin The End of the End. Non, pas toi, Paulo, tu resteras immortel, n’est ce pas ? Allez, on essuie sa petite larme car il nous le dit « No Reason to cry, No need to be sad ». Histoire de nous ressaisir, Paul sort ses griffes pour un rock sans prétention et assez moyen avec Nod Your Head. Ca me rappelle un peu Sgt Peppers mais en version au mieux « démo » au pire ratée. Dommage de clore l’album sur une fin aussi peu aboutie.
Alors ? Faisons les comptes ! 8 titres que je qualifierai de très bon à chefs-d’œuvre et donc 5 autres présentant moins d’intérêt à cause d’arrangements assez discutables, ce qui, avouons le, est le talon d’Achille de notre Paulo. Il manque ici un Lennon, un George Martin, un Elvis Costello, un Nigel Godrich à ses côtés pour lui dire « Non, Paul, pas ça ! »
Supérieur à « Driving Rain », peut-être au-dessous de « Chaos And Creation », Memory Almost Full se distingue par une plus grande variété dans les thèmes, les rythmes, les ambiances. De plus, comme je l’ai dit dans la chronique précédente, Paul a retrouvé une excellente forme vocale (l’absence de tournée ?). Comme disait Georges Marchais (politicien du siècle dernier, parenthèse pour les jeunes générations) : « Le bilan est globalement positif ».
Et si, finalement, alors que Chaos And Creation célébrait le talent du mélodiste, Memory Almost Full était comme une rétrospective des différentes facettes de celui qui, à 65 ans, n’est pas loin de fêter ses 50 ans de carrière avec toujours le même enthousiasme, la même inventivité. Pourvu que ça dure...